Un concert d’une rare intensité
Un orchestre baroque, des chanteurs et chanteuses au sommet de leur art et une direction précise et vibrante ont fait du dernier concert de Saessolsheim un moment que le public n’oubliera pas.

À cause du Covid, ce concert a eu lieu dans la salle polyvalente de Saessolsheim. Le lieu est évidemment moins inspirant que l’église, mais cela a permis aux organisateurs d’accueillir quasiment 300 personnes dans des conditions de sécurité parfaitement respectées.
Comme dans un film de science-fiction
Michel Gaechter, qui propose dans une série de concerts les 32 sonates de Beethoven, se trouvait là, à distribuer méticuleusement du gel hydroalcoolique à chaque personne se présentant à l’entrée. Cela fait un effet étrange de voir tous ces gens masqués, et en particulier les musiciens et chanteurs qui portaient des masques noirs. On aurait pu se croire, par instants, dans un étrange et quelque peu inquiétant, film de science-fiction…
La salle étant pleine, l’acoustique a été bien adaptée et le public a pu entendre dans de bonnes conditions l’œuvre de J. S. Bach.
Di Angeli, ensemble musical genevois, joue sur des instruments anciens et les artistes, tous pratiquants de musiques anciennes, sont choisis en fonction du programme. Sous la direction de Stéphan Mac Leold, cela donne des interprétations pleines de vivacité et de nuances.
La messe en si est un monument en elle-même, par son envergure, par son œcuménisme chrétien et surtout par le génie musical du compositeur. C’est une œuvre que l’on pourrait qualifier de militante. Elle exprime la foi profonde de l’artiste et encourage les fidèles à s’engager dans cette voie avec une force particulièrement entraînante.
Installés sur la scène de la salle, en hauteur, les instrumentistes sont, de fait visuellement, à l’arrière-plan. Les chanteurs et le chef sont en dessous et très proches du public. Cela fait que le texte, que tout bon chrétien connaît, est nettement mis en valeur. La musique soutient et illustre l’idée religieuse et laisse le premier plan aux chanteurs et chanteuses.
Cette musique du XVIIIe siècle est loin d’être poussiéreuse
Dans le « Christe Eleison », les basses avancent inexorablement, ni faiblesse ni mignardise, c’est le destin qui se déroule, alors qu’une mélodie sublime s’élance dans les airs. Dans le « Qui tollis », toute la musique devient lourde et pesante, le poids des péchés qui tirent vers le bas. Ce n’est pas figuratif, mais génialement suggestif. « Le Gloria » a été joué avec un enthousiasme et une énergie impressionnante et communicative. Il en sera de même pour tous les morceaux, tristes, poignants, jamais désespérés, ou enthousiastes, cette musique du XVIIIe siècle est loin d’être poussiéreuse et sonne pour qui sait écouter, très nettement actuelle.
Dans ce petit village alsacien de Saessolsheim, dans une salle polyvalente très prosaïque, a eu lieu un concert exceptionnel en beauté musicale et en profondeur spirituelle.