Conseil communautaire – Région de Saverne
À la diète de la dette
Fort endettement, charges de fonctionnement élevées : la situation financière de la communauté de communes de Saverne-Marmoutier-Sommerau n’est pas reluisante. Pour y remédier, les élus ont décidé de freiner les investissements et d’augmenter considérablement les taxes. Une cure au niveau des dépenses se prépare pour les années à venir.
Jeudi, en séance de conseil communautaire, Roger Muller fait le geste d’avoir de l’eau par-dessus la tête. Homme de peu de mots, le vice-président signifie ainsi que les finances communautaires sont au bord de l’asphyxie. Peut-être aussi reste-t-il sobre dans ses commentaires parce qu’en tant que grand argentier de l’ex-comcom du pays de Marmoutier-Sommerau, il peut se targuer d’un bilan budgétaire plus solide que celui de sa voisine de la région de Saverne (CCRS). Tout juste indique-t-il que « depuis deux ans, la CCRS a une capacité d’autofinancement négative. Vous avez fait le choix de rogner sur vos réserves et de ne pas augmenter les impôts. Mais les nouveaux investissements créent des charges de fonctionnement, et ça revient par effet boomerang. Maintenant, il faut faire un rattrapage. »
Jusqu’à 6 % de hausse des taxes
Celui-ci se situe à trois niveaux. Les deux premiers s’appuient sur une nécessaire harmonisation entre les situations des deux anciennes comcom fusionnées depuis le début de l’année. D’abord, la CCRS proposait un abattement, facultatif, de 15 % sur les bases de la taxe d’habitation, qui n’avait pas cours chez sa voisine. Cet abattement a été annulé à l’unanimité par les élus, ce qui signifie une recette de 210 000 €. Pour les habitants du périmètre de l’ancienne CCRS, on parle d’une augmentation « de l’ordre de 29 euros par foyer ».
Ensuite, les élus ont décidé (quatre voix contre, six abstentions) de rapprocher les taux des taxes locales qui prévalaient jusqu’à présent sur les deux territoires. Une telle démarche est rendue obligatoire par la loi, mais peut s’étendre sur un délai d’un à 12 ans. Dans la nouvelle comcom fusionnée, « les taux vont être harmonisés sur trois ans », ce qui représente en réalité quatre années budgétaires.
Actuellement, les habitants de l’ex-Marmoutier-Sommerau étaient bien plus taxés, compte tenu du plus grand nombre de compétences exercées par leur intercommunalité. Par exemple, la taxe d’habitation y était de 18,86 %, alors que sur le périmètre de l’ancienne CCRS elle était de 11,59 %. En 2020, hors hausse annuelle, le taux sera harmonisé à 13,76 %. Cette année, les contribuables de l’ex-Marmoutier-Sommerau verront leur taux diminuer à 17,59 %, tandis que les autres seront taxés plus fortement à 12,13 %.
Une véritable « saignée fiscale »
En troisième lieu, le taux des taxes locales sera haussé de 3 %, en plus de l’augmentation des bases de 0,4 %. Cette dernière recette supplémentaire viendra « tout juste compenser la baisse de 430 000 euros de la dotation globale de fonctionnement fournie par l’État », indique Roger Muller.
Au final, les habitants de l’ex-CCRS verront en 2017 leurs taxes locales augmenter de 6 % et leurs voisins d’environ 5 %. La totalité des impôts et taxes devrait rapporter 16 189 112 €, contre 14 508 761 en 2016 pour les deux comcom. Il faut dire que la nouvelle comcom fusionnée supporte une dette de 15 228 139 €, induisant une annuité de 2 291 199 €. Les dépenses de fonctionnement sont considérables, à 26 433 021 €, incluant des charges de personnel de 7 250 000 €.
Autant dire que l’année 2017 servira essentiellement à solder les affaires courantes, avec un timide budget d’investissement de 5 393 957 € limité aux dépenses déjà engagées, notamment 600 000 € pour la Maison de l’enfance de Marmoutier, 300 000 € pour le périscolaire à Otterswiller et 911 000 € pour des travaux de voirie (incluant un solde reporté de 411 000 € de 2016).
Le budget a été adopté à l’unanimité, ce qui n’a pas empêché quelques grognements. Du côté de Marmoutier, Jean-Claude Weil maugrée face à une période de lissage des taux qu’il juge trop longue. « Pendant quatre ans, Marmoutier va payer sans avoir de services en retour », puisque ceux-ci ne seront plus pris en charge par la nouvelle configuration communautaire, par exemple en ce qui concerne la compétence scolaire. Il voudrait donc que « Marmoutier aille tout de suite vers le taux final ». Laurent Burckel, de Saverne, l’appelle à « un minimum de solidarité. Si on augmente d’un bloc, le choc peut être important pour certaines communes. » Ce qui ne l’empêche pas de s’interroger à son tour sur le montant des travaux de voirie, hérité de l’ancienne comcom voisine.
Claude Zimmermann, de Dettwiller, juge à son tour qu’en plus des effets de la suppression de l’abattement, un lissage trop rapide serait « juste intenable pour les contribuables de l’ancienne comcom de Saverne. Il faut atténuer l’impact. » Dans l’autre sens, Pierre Kaetzel, de Monswiller, fait remarquer que « la loi prévoit 12 ans » pour un lissage. En tant qu’ancien président de la CCRS, il rappelle que « pendant des années, on a peu augmenté les impôts. Du jour au lendemain, les augmenter autant, ça posera des problèmes pour les contribuables et nos entreprises. » Médéric Haemmerlin, de Saverne, va plus loin et parle d’une véritable « saignée fiscale ».
Pour éviter une pareille situation à l’avenir, le président Dominique Muller invite, après cette « année de transition » lors de laquelle il n’y aura « pas de nouveaux emprunts », à réfléchir aux économies à réaliser. « On pourra faire des économies, rappelle-t-il, mais ce sera forcément au détriment des services à la population. » Limiter les services ou augmenter les tarifs d’usage des équipements ? Il y aura des choix déchirants à faire