Clavier et orgue pour un mariage heureux
Orgue et clavecin, un mariage heureux ? C’est la question qui se pose quand on songe à la grande différence de ces deux instruments, l’un puissant et avec des sons longs, l’autre extrêmement nerveux avec des sons cours.
Claude Sauter et Francis Jacob.
C’était le pari de Francis Jacob et de Claude Sauter : faire non seulement dialoguer, mais quasiment fusionner les deux instruments. Ils ont décidé de se répartir les « questions-réponses » caractéristiques de la polyphonie et des préludes et fugues de Bach. Ils se sont livrés à une sorte de restructuration de pièces issues du Clavecin bien tempéré, et de certains chorals. Pour finir en beauté magistrale par le concerto pour clavecin et orgue ou l’instrument à tuyaux tenait la place de l’orchestre.
Une sonate en trio
Le concert a commencé par une sonate en trio. L’instrument est parfaitement adapté à cette musique et l’harmonie se déploie magnifiquement dans l’église. Ensuite, changement d’instrument, voici une invention à deux voix, suivie d’une invention à trois voix où l’orgue et le clavecin se répondent. Intellectuellement, c’est très intéressant et la répartition opérée par les deux musiciens, éclaire la structure de l’œuvre. Cependant, la différence entre l’émission sonore de l’orgue et celle du clavecin procure un sentiment étrange.
Maître du temps et de l’espace
Les variations radicales d’espace sonore obligent l’auditeur à s’adapter presque instantanément. Il y faut une certaine habitude pas si facile que ça à maîtriser. Petit à petit, l’oreille s’adapte et le sentiment d’étrangeté diminue fortement.
On a parfois l’impression que l’orgue est le maître du temps et de l’espace, alors que le clavecin en comparaison semble être dans une sorte d’impatience quelque peu fragile et agressive. L’expérience est très intéressante et instructive. La musique de Bach n’y perd rien et la musicalité des deux interprètes a pu s’exprimer avec beaucoup de bonheur.