Cinquième essai transformé

Ce dimanche, le pianiste Michel Gaechter donnait son cinquième concert de l’intégrale des 32 sonates de Beethoven. Covid-19 ne freina pas l’engouement du fidèle public venu suivre cet épisode d’une entreprise initiée en 2018.

Au mitan de cet immense projet, Michel Gaechter proposait les deux sonates de l’opus 27 et la sonate de l’opus 28, trois pièces de 1801. L’opus 27 n°1 commence tout en détente comme en apesanteur d’où transparaît pourtant une profondeur insoupçonnée. Michel Gaechter tire de son pianoforte Théo Kobalt d’après Anton Walter de 1800 toutes les couleurs et climats de cette fantaisie tout à la fois légère et profonde. L’instrument n’a ni la dynamique ni la puissance des pianos modernes mais il distille un chromatisme sonore épatant.

Le pianiste semble se désaltérer du flux sonore qu’il fait naître sous ses doigts et le public apprécie. L’opus 27-2 au titre de « Clair de lune », né de l’imagination d’un poète critique musical, porte mal ce titre tant cette œuvre porte en elle d’abîmes tragiques. Michel Gaechter ne s’y trompe pas tant il dépouille le propos de toute mièvrerie.

Une puissante interprétation
La grande sonate opus 28, baptisée « Pastorale » par l’éditeur Cranz de Hambourg porte, elle, plus judicieusement son titre tant apparaît le caractère campagnard dans le scherzo. Le tragique n’est pourtant pas bien loin même sous une ambiance lumineuse et enjouée. Respectant les intentions et volontés du maître de Bonn, Michel Gaechter en livre une puissante interprétation qui gagne l’adhésion d’un public depuis longtemps conquis.

Pour faire bonne mesure, l’artiste a gratifié ses auditeurs en guise de bis des six variations de l’opus 34. Le piano Théo Kobalt donnera de sa voix encore pour le prochain concert tout dédié à l’opus 31. Pour les phases ultimes de l’aventure il sera substitué par deux instruments plus puissants et aux claviers plus étendus, un Fritz des années 1820 et un Schantz des années 1840.

Ce cinquième volet d’une entreprise qui fera date dans la vie musicale régionale a transformé de la plus belle des manières les essais des épisodes précédents pour la plus grande joie d’un public nombreux et fidèle.